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09/05/2018

l'oeil & la plume... Montagnité

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texte le Salut invérifiable d'un Idiot souterrain                                                                     la Nasse jlmi  2008
 

 

-1-

        L’étoilement est infini, c’est-à-dire dans tous les sens : les solitudes ne font pas un peuple, & mendier des fatigues n’a jamais été suffisant. Les beaux aguets dénouent cette plainte.

 

-2-

        Chaque parole s’étend & dure tant qu’elle peut, sans que rien ne soit à regretter ; c’est parfois une vue. Quiconque s’en sera réjoui disparaîtra tout de même, comme elle, & bien que là il n’y ait plus de peines, ce qui n’est pas n’est pas. Chaque halte n’offre qu’un repos provisoire, & devient toujours assez vite le lieu de départs neufs. & s’il y a une halte définitive elle n’est que la décomposition de nous-mêmes, & ce n’est pas vraiment le repos. Ce que ce feu là a recroquevillé ne paraîtra plus. Tout est tissé de cette brume, & cependant la mort n’est rien. Qui d’autre naîtra de cette intuition ? Déjà de nouveaux usages s’éveillent, des foudres & des éclaircies, d’autres matins clairs, d’autres sécheresses, & le milieu du pont au milieu des fantômes. Les cendres des mots n’empêcheront pas d’autres éclosions : Elle s’en passe le plus souvent. & chaque grand corps La connaît pourtant, parée d’exactitude, & s’emmitoufle de silence. Cette étendue est une nudité sans horizon, & les départs ne prouvent pas grand-chose.

 

-3-

        Quelle est cette humanité entrevue ? L’oreille lointaine d’un voyage, la vie plane dans la paix retirée & le rythme, la chimie, le beau soleil au-dessus des charniers. L’étendue ouverte & plane succède à l’étendue ouverte & plane – les pèlerins s’y font rares – chaque façon de porter une boisson à ses lèvres est singulière : partout le grand corps est vivant, disposé, disponible. & il n’y a rien au-delà de ce promontoire, car personne ne domestique le vent. Les fatigues succèdent aux fatigues, les siècles recouvrent les siècles, & tout se transforme. L’aube aimable ne dissout pas ces fatigues, mais l’été est blotti contre l’étoile, lieu parmi d’autres d’une fécondité. Le ventre de l’atmosphère accueille tous les pollens, les terres tous les ossements – les franges de l’éveil, les chairs & les distances justes des corps qui s’attirent. Dix mille soleils nous émeuvent & vrombissent, un chant se disloque à tout moment, le long du bruit indémontrable sensationnel & suffisant : la transformation n’est jamais interrompue. C’est aussi un lieu sévère où la parole n’est pas décisive. Les arbres connaissent ces sobriétés, & l’acquiescement aux vents secs.

 

-4-

        Elle n’est pas une instance qui octroie, mais la masse émue & céleste d’un grand corps ; l’infini est la grandeur de la matière, n’est-ce pas ? Nous n’habitons pas parmi La Terre, nous en sommes une expression, & ce qui est exprimé n’existe pas en dehors de ce qui s’exprime, secoué sans heurt d’un grand rire. Qu’est devenue cette humanité que les fleuves disséminaient, & ses vues, & ses gestes emplis d’échos ? Les mondes poreux ! L’étendue est vivante, la pensée est vivante, lumière modeste & solitaire & vivante, où souffle le grand vent calme.

 

-5-

        Le cœur frais de cendres, ici, nuit de pierre & jour avoué : qu’est-ce qu’un promontoire parmi l’obscurité physique ? Rien qu’un promontoire parmi dix mille autres – effluves que le vent ignore & disperse. La lumière matérielle coule & file de lisière en lisière, sans fin, sans origine : il y a un temps pour chaque plainte, & l’éternité pour se réjouir – élan de la graine au fruit, dont chaque fleur porte aussi l’intuition : le sanglot d’un papillon ivre n’est plus qu’une rumeur parmi d’autres.

 

-6-

        Rien n’est vrai : tout est réel. Chaque reflet est également impliqué par l’infini sans double. Les figures se consument sous la voûte, qui n’en est pas une mais l’affirmation sans borne. Quelle pitié pour le bétail humain ? Les montagnes ne tombent pas. Cependant le mot ruisseau ne dévale aucune pente, la brume est dix mille gouttes. Les fatigues se lavent à la fraîcheur d’une humanité plus discrète.

 

-7-

        La gravité ne dissout pas le désespoir, les pentes ne cessent pas de jaillir. Ici pourtant rien ne meurt, mais les montagnes de pluie & de ciel. Lumière les pierres ! Lumière chaque racine, chaque feuille ! Lumière l’eau que la pente enlace ! Partout : la clarté. Oui ! Le grand corps se creuse, où l’intuition s’épanche : voici l’à-propos du lieu adéquat & du moment singulier, ni perdus ni trouvés – étreinte, alignements ! & les amitiés rares & belles, un creuset où l’étoile exhale les brumes & les odeurs ! La lumière en crue ondule doucement dans les fibres, éminente, utile…mais tout est calme près des fleuves enflés, malgré le marasme de l’affectivité humaine, pénible autant que sombre. Les misères n’ont jamais fait un peuple.

 

-8-

        L’autre état est sans postérité.

 

 

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08/05/2018

l'oeil & la plume... Ay la Lune

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texte de cathy garcia                                                                        collage photographique jlmi  2013
 

Signal de départ

Pour la singulière multitude

Métissée sous la lune

La lune !

Elle nous en chantera

Des fables et des n’importe quoi

Des airs de rien, de grands chemins

Musique de vent et de vauriens

Mais aujourd’hui comme hier

L’aube désenchante

Aimable l’air de rien

Le quotidien nous rhabille

Une belle blouse de travail

Le blues sous le chandail

Le train de la vie…

Vous êtes à bord mais de justesse

De peu et vous le manquiez !

Voici le formulaire

Remplissez-le

C’est en haut à gauche

Qu’il vous faut saigner

Alors vous offrez votre veine

En songeant à la lune

Aux petites louves

Illuminées

La lune !

Elle vous en chantera

Des fables et des n’importe quoi

Des airs de rien, de grands chemins

Musique de vent et de vauriens.

07/05/2018

l'oeil & la plume ...: lors du pillage d'une caravane

pillage2.jpg
texte de werner lambersy                                                                                                  ill. linda zacks+jlmi  2012
 

Lors du pillage

D’une caravane d’Ethiopie

On a trouvé

Deux malles en fer

Pour le bateau de Marseille

Qui part de Djibouti

 

Dedans il n’y avait

Que des carnets griffonnés

Et des bouts de papier

Beaucoup

Dont l’encre semblait pâle

 

On s’en servit

Parce qu’ici le bois est rare

Pour allumer le feu

Du bivouac

C’était mieux que la crotte

De chamelle

 

Quelqu’un a reconnu écrite

En français

Et en arabe l’en-tête

De lettre

Du marchand d’armes A. R.