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24/09/2018

l'oeil & la plume... encre & sang

André Laude 02sm.jpg

manuscrit de andré laude

 

Je fais de ma vie de nuit en nuit un tas d’ordures.

Je fais de ma vie une brumeuse chronique.

Je fais de ma nuit le carrefour des fantômes.

Je fais de mon sang un long fleuve

qui tape à mes tempes.

Je fais de ma peur un oiseau noir et blanc

Je fais d’un oiseau mort, pourri,

l’enfant que j’aurais pu être.

Je fais d’un enfant un feu fou, un bloc de cendres.

Je fais de ma mort à venir un festin de serpents.

Je fais d’un serpent la corde pour me pendre.

Je fais d’un long, acharné silence le testament

de tout ce qui fut désastres, horreurs, ennuis,

ruptures et interminables hurlements.

Je pisse de l’encre et du sang.

Je pisse de l’encre et du sang.

Je chante sur le bûcher des châtiments.

 

 Source  http://www.larevuedesressources.org/des-poemes-d-andre-laude,062.html

 

 

22/09/2018

l’œil & la plume... le mouchoir

le_fou_5_by_takkartwork.jpg
texte de murièle modély                                                                                                                ill. © takkartwork

tu te dis
qu'en te mouchant
bien fort
ça va venir
oui, ça va venir
la morve
la morve oui, mais pas que
en soufflant très fort
ça va tomber
par petits bouts
bien drus
tu te dis ça
bien gras
dans le mouchoir
le chagrin
les fins de mois difficiles
la peur du lendemain
et ton gros cul t'as pris du poids
et tes petites trahisons et le type
qui t'avait même pas dit son nom
tu t'en foutais
t'en avais pas envie
t'avais ouvert les jambes
tu souffles par les narines
oui c'est possible
dans le mouchoir en étoiles
ta dernière cuite
tes larmes sans raison
la désespérante absence de sens
tu mouches tes allitérations
tes phrases en boucle
qui ne veulent rien dire
et ton cancer du sein
des ovaires
des poumons
celui que tu auras un jour
parce que tout le monde un jour
tout ça
dans la même glaire
en te mouchant c'est sûr
tout va gicler
c'est sûr
ça ira mieux
c'est sûr
quand t'auras vidé
ton crâne
tous tes os
complètement
récurés et lisses

 

21/09/2018

l'oeil & la plume.. sommet d'où jeter son pinceau ( fragment)

Utagawa Hiroshige – Rough Sea at Naruto in Awa Province (1855).jpg
texte de werner lambersy                    ill utagawa hiroshige    Rough Sea at Naruto in Awa Province (1855)  ( partielle )
 

Si tu t’adresses à quelqu’un

N’oublie pas jamais

Que tu parles

 

À un mourant

À quelqu’un qui est en train

De mourir

 

Et s’il répond

Que c’est la mort qui te parle

À toi qui vas mourir

 

Ne l’oublie pas

Tout est affaire d’ultimatum 

 

Que ta voix s’apaise s’épuise

Puis passe au poème

Qui se tient

 

Au plus près du silence dont

La ruine est comme

De l’eau

 

Qui retomberait sur une autre

Avant de gonfler

Un nuage

 

Et d’arroser les terres du bas

 

La voix retourne

Toujours aux racines ici d’un

Arbre et là de l’herbe

 

Ici d’une pierre et là de vents

Levés plus hauts que

Les bronches

 

 

Où les bruissements de l’âme

Tannent une surface

Désertique