02/04/2018
l'oeil & la plume... vu d'ici
Vu d’ici
rien n’indique
la profondeur du nuage
vu d’ici
rien n’indique
la profondeur des cieux
au-dessus des nuages
vu d’ici
rien n’indique
la profondeur des nuits
au-dessus du ciel
vu d’ici
rien n’indique
la profondeur de l’œil
qui regarde
in Comme s'agitent les seaux au plus profond d'un puits inédit 2013
merci à cg pour la photo du puits de ciel
00:28 Publié dans l'oeil & la plume | Lien permanent | Commentaires (1)
01/04/2018
l'oeil & la plume... il y a ceux...
Il y a ceux
qui se pétrifient dans des lits qu'on croirait des radeaux
échoués sur des interprétations inachevées
quand le monde tempête l'inexprimé
Il y a ceux engloutis
par des nuits froides
qu'elles gèlent toutes paroles
on ne les entend jamais
et ils s'en foutent de toute façon
Il y a ceux qui voudraient couper le fil des jours
mais ils ont peur de dégringoler
ou peur de s'envoler
Il y a l'autre qui
boit une bière en boite
en matant le cul des filles comprimé dans des jeans rapiécés
et se dit que l'amour ne sait autant se déhancher
Il y a Eliana qui
du haut d'une tour HLM
suspend ses grimaces à l'intérieur d'une vitre
et elle voudrait traverser son reflet
Il y a un très vieux souriant
qui regarde jouer les enfants
en se disant qu'il va être temps
de lâcher le guidon à ces jeunes remplaçants
Il y a Elle ondulante sur une piste de danse
qui s'exerce à combler le vide des sentiments
avec un peu de prestance elle sera au top
dans la mise en scène des apparences
Il y a un fou à Varsovie
qui frotte le flou des morceaux de sa vie
dégoulinés de ses lunettes embuées
il écrit le télégramme de son existence
avec l'encre de la dernière pluie
Il y a elle il y a lui
qui se tiennent serrés dans un coin de la nuit
quand la multitude vous est hostile
le nous est une île
où il est bon de se reposer
Il y a vous, il y a moi
Il y a ceux qui ne savent de chez eux
que le bord d'eux même
et ne le franchiront jamais
00:26 Publié dans l'oeil & la plume | Lien permanent | Commentaires (4)
31/03/2018
l'oeil & la plume... l'étonnante histoire de Skunkdog
Ne soyez pas surpris si la mort vient de l'intérieur...
Sept jours & six nuits le héros veilla sans pitié.
horizontalement sous le ciel. sans manger sans boire sans aimer.
après quoi en avait-il ? que cherchait-il ?
un signe ? une réponse ? une issue ? Quelque chose de neuf...
Maintenant au septième soir du septième jour le héros
ne tenait plus qu'à un fil. le manque de sommeil, de vivres
& de bras amoureux prenait sa revanche. il cessa de
regarder le ciel.
Mon beau héros. lui dont l'ardente volonté était de garder les yeux
ouverts dans l'instant échoua.
Parce que le héros avait mis à vif les nerfs du ciel. ses regards perçants
l'avaient excité. quand enfin il baissa les yeux les étoiles
étaient devenues cinglées. cassiopée se balançait comme un berceau
Un observateur de hasard incapable de dormir, rêvant à une
fenêtre, comptant les moutons, n'en aurait pas cru
ses yeux. la voie lactée se trémoussa se trémoussa. un troupeau
d'étoiles filantes. des comètes folles. et 1'étoi1e du grand-chien
pareille à une lune nouvelle-née.
mais le héros ne vit rien.
Comprenez : le ciel quand on le surveille est comme une marmite sur le feu. à
la minute-même où le héros tourna les yeux les cieux débordèrent.
météorites & planètes passèrent au-dessus de lui comme des chauves-souris.
qu'aurait-il pu dire ? il n'était pas en forme. Sa langue devenait ivre &
je ne parle pas de sa vue.
ses yeux ne voyaient rien double.
Tout était-il perdu ? jamais de la vie. c'était moche. mais considérez
le problème sous cet angle : le héros avait enfin les pieds sur terre.
Soudain (comme dans un film monumental) se déclencha
une suite d'événements qui pénétrèrent son être intime ; son âme
profonde. faisant éclater ses structures. criant ho-hisse à son
expérience formelle :
sept fourmis rouges mordirent sa main gauche
six pierres tendres roulèrent sur sa langue
ses cinq doigts s'étendirent sur un octave
quatre plumes jaunes surgirent de nulle-part
ainsi que-trois oiseaux bleus
au-dessus de sa tête (halo) firent cercle deux papillons-lunes
il avait faim alors il happa comme un iguane
il avala les deux papillons
son estomac frémit
il s'engourdit. le trou noir.
le sommeil le terrassa
(une minute seulement
mais cela lui sembla dés heures)
& il rêva :
espérons qu'il n'est pas en danger
Il arrive sur la frayère de certains
animaux sacrés. il a peur d'être obligé de
copuler avec l'un d'eux. les danseurs indigènes l'encerclent
puis le cernent. ils le déshabillent. son costume
d'Adam a changé d'étoffe. il a une nouvelle coupe
féminine. on le purifie. on enduit son corps
d'essence de sang de taureau. on lui demande de choisir
un animal.
Un chat tigré se frotte à sa jambe. Un chat gris & or
aux grands yeux bleus. des yeux si bleus que l'eau en vient
à la bouche du héros. Une vache à la peau lisse aux pis laqués de rouge
(très chinois) s'étire & se roule dans un tas
de bleuets. fleurs bleues. plus bleues que
les yeux du chat.
Le héros s'interroge sur ses yeux. Dans cette atmosphère
est-ce qu'ils paraissent aussi plus bleus qu'ils ne sont?
zut pas de miroir en vue. est-ce que l'effet aura
disparu quand il rentrera ? il espère que non.
Sur sa gauche les collines vertes si vertes. un vert
froid de menthe. il regarde au loin & sursaute.
il voit Skunkdog.
C'est un terrible mâtin au long pelage luisant. poils noirs.
sa verge au contraire de ces chiens qui ont un
chibre rouge & visqueux est d'un blanc pur. le héros palpite là en bas
comme une femme & ne peut réfréner un geste obscène.
Skunkdog écarquille les yeux. 2 formidables soucoupes bleues.
les yeux les plus bleus qu'on puisse imaginer. plus bleus que les bluets,
plus bleus que la méditerranée.
Le héros est vaincu. Impudique. il se détourne puis regarde encore.
oh non ! Skunkdog est parti. le héros court vers les
vertes collines. Il est nu & les enfants rient.
il s'en moque. il déracine les arbres les plantes & les
rochers. il s'arrache les cheveux. partout
d'étranges animaux s'accouplent. la température monte. des femmes
mangent de la baleine. d'autres femmes exhibent leurs
ventres.
Dans un ravin il tombe sur Skunkdog. on l'a écorché.
il voit sa carcasse encore chaude. le héros tombe prostré
il va se désoler quand de nulle part lui tombe
la peau de son amour abattu.
il l'enfile.
elle lui va comme un gant.
il n'est plus héros.
il n'est plus héros.
mais Skunkdog
poils noirs yeux bleus.
doggod dog / god doggod
yeux bleus yeux / dieu dieu bleu
le chien s'envole dans la lune.
Traduction Henry Meyer
Ce poème a été publié dans Starscrewer n°11 Spécial Punk (1979)
Voir le fac similé original : première page, deuxième page, troisième page.
Entendre Patti Smith lire Skunkdog en 1971 (piste n°12) sur le site Ubuweb.
Source Lucien Suel http://academie23.blogspot.fr/search/label/Traduction?m=0
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