05/10/2017
l'oeil & la plume... je n'irai même pas cracher sur vos tombes
Je n'irai même pas cracher sur vos tombes,
cracher
la blessure originelle
qui ne guérit pas
ne peut guérir
juste vivre avec
et ainsi soit-il alléluia
marcher dans les rangs
port obligatoire
du masque social
qu'est ce qui me retient donc de m'en défaire ?
décliner une identité
comme on décline
une invitation
oui nos vies
ne sont que romans de gare
qui n'ont jamais obtenu de prix
pas de prix la vie
pourtant elle se vend s'achète
à tous les coins de rue
peut-on marcher sur des corps
sous prétexte qu'on ne les sent pas
sous ses semelles ?
et sinon à part ça ?
parler de choses plus gaies
plus intéressantes
se faire des politesses
sur des corps piétinés tellement oubliés
qu'ils en deviennent invisibles
inexistants
anonymes
jusqu'au jour où ces corps là se relèvent
pour devenir combattants de la déveine
jusqu'au jour où ces corps
reprennent consistance
par la violence
pulvérisent le sens
jusqu'au non sens
alors ON a peur.
alors ON s'indigne
ON proteste
balbutiements d'intérêt.
la violence n'a jamais été une cause
seulement un résultat
noyer diluer sous des flots de paroles
qui ne communiquent rien
seulement du bruit
du vent du paraître
de la culture vaine
puisque rien ne se fait
rien ne change
l'érudition étalée comme une pâte
trop grasse
sur la tranche maigre des jours
prétentieuse omniscience
rien ne sert de savoir la leçon
si elle demeure non appliquée
tout ça
ne sert à rien
sans le coeur sans l'humilité
sans véritable soif de justice
pour TOUS
tout ça ne sert à rien si on ne sait pas
toucher à mains nues les plaies du monde
boire au même goulot que les parias
s'immerger dans la merde
moi non plus je ne veux pas !
je ne veux plus.
la merde aussi est un résultat
c'est l'hiver
des gens vont geler dans la rue
vous les férus d'Histoire
de quelle histoire
faites-vous donc partie ?
de celle qui a enfanté
la sale gueule du monde
d'aujourd'hui ?
celle qui ferme les yeux
s'entête jusqu'à l'absurde
enrobe la lâcheté
de discours prétentieux
déguise la peur
sous des airs de raison ?
chèques de désinfection
soupirs de circonstance
à la grande messe médiatique
c'est important de se tenir
informés.
et pendant ce temps les enfants des enfants
deviennent cruels
ce n'est plus un fossé mais un abîme de néant
qui nous sépare
le mépris n'est qu'un faible rempart
l'orgueil isole
la souffrance nous rattrape toujours
et dans le miroir qui m'est tendu
je ne peux grandir
je ne peux faire que fuir
et me cogner dans les angles..
cracher
cracher sans cesse
pour ne pas étouffer
de rage de haine
cette immense peine
sortie sanglante et nue
d'un ventre froid.
in Ombromanie, Encres Vives, 2007
00:41 Publié dans l'oeil & la plume | Lien permanent | Commentaires (1)
04/10/2017
l'oeil & la plume... l'oeil aux gouttes d'ombre
Des mots.
Des mots tressés.
Depuis ton corps,
c’est le plus beau cadeau que j’ai reçu
On ne peut pas effacer ce qui a été dit.
Je ne sais même pas ce qui fut le plus cruel ni comment en parler.
Encore maintenant.
Mélancolie de cette musique poussiéreuse
du vide de la tendresse
toujours prête à sourdre au dialogue de nos ombres mortes
sous une caresse de frissons acides
furieuse et douce, endolorie d’odeurs chatoyantes,
parfums piquants d’orage au goût bleuté
dans l’éclatement d’un sourire
Puisse le puissant désir
au rouge profond enceint de ciel chaud
horrible charade des couronnes d’extase
foutre le camp au-delà de la déception
dans l’en deçà de nos deux vies ou
aux avenirs ébouriffés de nos chimères
Que les vents de solitude te soient très longtemps favorables
car les étoiles exténuées s'abreuvent toujours à la sève des pierres
dans un silence à troubler l’eau claire
des percussions étouffées d’un tambour déchiré
Energies telluriques radicales
majestueuses
des orgues flottantes de nos cathédrales aériennes
immobiles dans le courant lent
et long du temps des pierres.
Nécessité des migrations
plus rien que la lumière de l’œil aux gouttes d’ombre.
00:49 Publié dans l'oeil & la plume | Lien permanent | Commentaires (1)
03/10/2017
l'oeil & la plume... Ezra Loomis Pound
La barge
Des pompes funèbres
La large gondole
Municipale
Du service des pauvres
Emportait Ezra
Pound
Quelques uns
Sur les quais de venise
Encore pâle
Se signaient
Sans savoir
Qui passait là
Et levaient distraitement
Leurs chapeaux
De la gare centrale
Au Lido
Et de la Dogana
A l’arsenal
Le grand canal gris
Avait noué
Sa cravate de deuil
Sous le ciel
En dentelle des balcons
...
Et noir anthracite
(comme chez Faber &
Faber la toile
Du recueil des Cantos)
Glissait
Sur l’onde glabre
Le cercueil de Loomis
Le poète
Dont le chant sera l’os
A moelle
Des poèmes modernes
Parmi le clapotis de l’eau
Contre la pierre
Du ciel
Et des palais aux volets
Clos
Sur les fêtes d’hier
Et la musique de Vivaldi
...
Pas de pleureuses prises
Dans la plèbe
Se griffant le visage
Et les cheveux en bataille
Ni de tocsins
Aux lentes volées
De corbeaux sur la ville
Pour le cadavre du barde
Américain
A la crinière de lion battu
Et de Pégase
En plein vol banni
Pour ses erreurs fascistes
A Rome et lu
Comme on reste stupéfait
Par un feu
D’artifice de génie encore
Jamais vu
Ainsi s’en allait-il presque
Anonyme
Le géant hirsute
…
Ainsi s’en allait-il presque
Seul
Et l’eau derrière lui
Refermait
Son manteau
Sur le crime
De ses chroniques
Et le mensonge de sa folie
…
Ainsi allait-il pestiféré mais
Poète avant tout
Vers où
La faute n’aurait une place
Qu’en second
fragments du poème publié chez l'Âge d'Homme en 2006
00:05 Publié dans l'oeil & la plume | Lien permanent | Commentaires (1)