24/09/2018
l'oeil & la plume... encre & sang
manuscrit de andré laude
Je fais de ma vie de nuit en nuit un tas d’ordures.
Je fais de ma vie une brumeuse chronique.
Je fais de ma nuit le carrefour des fantômes.
Je fais de mon sang un long fleuve
qui tape à mes tempes.
Je fais de ma peur un oiseau noir et blanc
Je fais d’un oiseau mort, pourri,
l’enfant que j’aurais pu être.
Je fais d’un enfant un feu fou, un bloc de cendres.
Je fais de ma mort à venir un festin de serpents.
Je fais d’un serpent la corde pour me pendre.
Je fais d’un long, acharné silence le testament
de tout ce qui fut désastres, horreurs, ennuis,
ruptures et interminables hurlements.
Je pisse de l’encre et du sang.
Je pisse de l’encre et du sang.
Je chante sur le bûcher des châtiments.
Source http://www.larevuedesressources.org/des-poemes-d-andre-laude,062.html
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23/09/2018
parution.... Nouveaux Délits 61
octobre 2018
Quand j’ai commencé la revue, dans les premiers numéros, j’étais systématiquement au sommaire. C’était une façon de faire connaître mon travail en même temps que celui des autres auteurs que j’accueillais. Puis devant leur nombre sans cesse croissant et lassée aussi de ma présence, j’ai libéré la place avec joie. Mais le problème des poètes revuistes, comme ces cordonniers (quand il y en avait) mal chaussés, c’est qu’à force de se mettre au service de l’écriture des autres, ils n’ont plus beaucoup, voire plus du tout de temps pour la leur. Il y a aussi un fait : la réciprocité chez les êtres humains — et les poètes ne font pas exception — ne coule pas de source, c’est pourquoi le proverbial « jamais aussi bien servi que par soi-même » prend au final tout son sens.
Alors pour une fois, je reprends un bout de territoire ici, juste le temps de mettre un coup de projecteur entre autre sur la sortie d’un livre à lente maturation auquel je tiens et que publient les éditions Cardère, qui hébergent déjà trois autres de mes bébés. La bonne maison Cardère publie avant tout des ouvrages sur le pastoralisme, la poésie c’est en plus et elle n’a jamais eu l’imbécile idée de choper la grosse tête ou de s’illusionner sur un quelconque pouvoir d’éditeur, pas plus qu’elle ne s’illusionne sur les auteurs eux-mêmes. Une chose est essentielle en poésie — et qui dit poésie, dit vie — : une forme d’humilité. Pas une posture humble non, juste quelque chose de très naturel, humus, humilité, humain, cette racine plantée dans la terre qui nous nourrit et qu’il ne faut jamais oublier, quelle que soit la force et l’envolée de notre imaginaire ou de nos prétentions.
Écrire est une chose, être lu en est une autre. Entre les deux se tissent de fragiles et éphémères passerelles dans lesquelles se prend la rosée de l’aube, trésor qui scintille un instant — précieux instant — avant que le jour ne vienne le boire.
CG
monde de rosée
rien qu'un monde de rosée
pourtant et pourtant
Issa
illustrations : Muriel Dorembus
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22/09/2018
l’œil & la plume... le mouchoir
tu te dis
qu'en te mouchant
bien fort
ça va venir
oui, ça va venir
la morve
la morve oui, mais pas que
en soufflant très fort
ça va tomber
par petits bouts
bien drus
tu te dis ça
bien gras
dans le mouchoir
le chagrin
les fins de mois difficiles
la peur du lendemain
et ton gros cul t'as pris du poids
et tes petites trahisons et le type
qui t'avait même pas dit son nom
tu t'en foutais
t'en avais pas envie
t'avais ouvert les jambes
tu souffles par les narines
oui c'est possible
dans le mouchoir en étoiles
ta dernière cuite
tes larmes sans raison
la désespérante absence de sens
tu mouches tes allitérations
tes phrases en boucle
qui ne veulent rien dire
et ton cancer du sein
des ovaires
des poumons
celui que tu auras un jour
parce que tout le monde un jour
tout ça
dans la même glaire
en te mouchant c'est sûr
tout va gicler
c'est sûr
ça ira mieux
c'est sûr
quand t'auras vidé
ton crâne
tous tes os
complètement
récurés et lisses
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