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13/06/2018

l'oeil & la plume... pièces rapportées

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texte de bruno toméra                                                                                                                 ill. de jlmi 2017

 

 


 
Lampadaires incolores, mon ombre déambulait entre ces rues de pierres jaunes, la tronche ravagée par la Guinness. Boite de nuit de merde, ce connard me branchait poésie, j'en avais rien à foutre de ses parachutages égotiques dans les pourtours de sa libido, il s'emmerdait autant qu'un autre, je n'avais plus besoin d'alibi, j'ai appris à m'en passer, c'est cela ma façon d'être poète, je n'ai pas d'alibi. On était donc tous là à attendre l'autobus de la mort et chacun un arrêt ou descendre et je rentrais dans cette morgue de la chambre d'hôtel, entre ces murs gelés de la mort, avec ces décorations virtuelles, ces draps élimés sans odeur, cet ennui gravé dans l'enclave de l'univers où il n'y avait rien à picoler, rien que de la sale solitude qui gouttait du plafond.


Mon frère crevait les poumons dentelés par des virus aux noms mystérieux, il faut gaver de solennel ce qui nous échappe, mon frère crevait et je regardais ces femmes vertes en sabots de plastiques et en uniformes verts et je me demandais si elles portaient une culotte sous ce froc des urgences de l'hôpital Louise Michel, elles cavalaient chaque fois qu'un être descendait à un arrêt et je visionnais sur mon dvd perso haute définition les contours, le modelé de leur toison pubienne, l'odeur de l'amour, l'odeur de la mort, monstre et voyeur, une psycho m'a dit plus tard que l'on se protège comme on peut, je surnageais dans cette conscience ordonnée et désorganisée qui flirte dans le sempiternel show du chaos.


Les pierres jaunes suaient et craquait sous le gel, j'attendais l'amour, je l'inventais muse à la peau blême, filles fleurs en dessous transparents sur les pages glacées des pubs des magazines qui permettent de glorifier l'insatisfaction après une putain de journée de boulot, des filles de pub télé qui déballent sous contrôle juste de quoi se branler entre deux flashs catastrophiques, filles aux longs cheveux bruns qui me faisaient bander, môme, quand je voyais ces hippies femelles balançant leur crinière et leurs hanches, connasses aussi tordues que leurs mères, leurs jupes long rideau de théâtre où  je débutais dans le registre des fantasmes convenus et fabriqués par la propagande du moment.


Président escroc, sénateurs séniles, chefs de gangs libéraux, mains idéalistes et crocheteuses, donneurs de morales surpayés, experts caressant tous les sens du poil, tous fourgueurs de cames télévisuelles où l'information n'est qu'une anecdote frelatée de la sur-réalité. L'important étant de passer le temps, tout le monde ingurgite la came de la peur en se prélassant dans de confortables canapés. Adrénaline télévisuelle, le moi projeté dans les purificateurs cataclysmes.


Les pierres suaient le gel par les fêlures, appuyé contre cette fontaine des souhaits je traficotais mon existence comme un chien rouge sous les clignements d'œil des étoiles qui se foutaient de ma gueule.


Vendre de l'impuissance, je vendais contre un verre des poèmes écrits sur des cartons à bière, sur du papier sandwich et ils me rigolaient au nez leurs dents cariés, leurs sourires imbéciles me trouaient le thorax, je plongeais dans mon océan houleux et beau, seuls quelques coups de poing me ramenaient au graphique plat des conneries.
 

          Je me fous du monde éperdument, éperdument.


Deux Bouddhas flics me poussèrent du bout de leur tantra loyaliste, j'étais sur la bonne voie, plus loin, inconscients, des gens attendaient leur tour à l'arrêt d'autobus.

2007

 

05/02/2018

l'oreille & la plume... psychorama holographique ( fragments lus par Cathy Garcia )

merci à cathy garcia pour ces lectures après publication dans sa revue

 

26/11/2017

l'oreille & la plume... Charlie Parker & Jack Kerouac

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“Charlie Parker looked like a Buddha” lu par Jack Kerouac

 

 

 

Charlie Parker looked like Buddha.
Charlie Parker who recently died laughing at a juggler on TV
after weeks of strain and sickness
was called the perfect musician
and his expression on his face
was as calm beautiful and profund
as the image of the Buddha
represented in the East — the lidded eyes
the expression that says: all is well.

         This was what Charlie Parker said

when he played: all is well.
You had the feeling of early-in-the-morning
like a hermit’s joy or like

         the perfect cry

of some wild gang at a jam session
Wail! Whap!
Charlie burst his lungs to reach the speed of what the speedsters wanted
and what they wanted was his eternal slowdown.

A great musician
and a great creador

        of forms


that ultimately find expression
in mores and what-have-you.

Musically as important as Beethoven
yet not regarded as such at all
a genteel conductor of string orchestras
in front of wich he stood proud and calm like a leader

       of music

in the great historie Worldnight
and wailed his little saxophone
the alto


       with piercing,

clear lament
in perfect tune and shining harmony
Toot!

 

As listeners reacted
without showing it
and began talking
and soon the whole joint is docking and talking
and everybody talking —
and Charlie

         Parker


whistling them on to the brink of eternity
with his Irish St.

         Patrick Patootlestick.


And like the holy mists
we blop and we plop
in the waters

         of slaughter

and white meat —
and die
one after one
          in Time.

And how sweet a story it is
when you hear Charlie Parker 

         tell it


either on records or at sessions
or at official bits in clubs
(shots in the arm for the wallet).
Gleefully he whistled the

             perfect

             horn


anyhow made no difference...
Charlie Parker forgive me.
Forgive me for not answering your eyes.
For not having made an indication
of that which you can devise.
Charlie Parker pray for me.
Pray for me and everybody.

In the Nirvanas of your brain
where you hide —
indulgent and huge —
no longer Charlie Parker
but the secret unsayable Name
that carries with it
merit not-to-be-measured
from here to up down east or west.


          Charlie Parker lay the bane

off me ...and everybody.

 

Extrait de Mexico City Blues 1959 Chorus 239, 240 & 241.

traduction de Pierre Joris

 

Charlie Parker ressemblait à Bouddha

Charlie Parker  qui est mort récemment

En riant d’un jongleur à la télé

Après des semaines de tension et de souffrance, s’appelait le Musicien Parfait.

Et son expression sur son visage

Etait aussi calme, belle et profonde

Que l’image de Bouddha

Représenté en Orient, les yeux voilés,

L’expression qui dit ‘’Tout va bien’’

-         Voilà ce que Charlie Parker disait

Quand il jouait, Tout Va Bien.

On avait le sentiment lever-du-jour

Pareil à la joie de l’hermite, ou au

cri parfait

D’une bande sauvage à une jamesession

‘’Wail, Whap’’ – Charlie fit éclater

Ses poumons pour atteindre la vitesse

De ce que les mordus de la vitesse voulaient

Et ce qu’ils voulaient

C’était son ralentissement Eternel.

Un grand musicien et grand créateur

de formes

Qui ultimement trouvent leur expression

Dans les mœurs et ce que vous voudrez.

 

Musicalement aussi important que Beethoven

Mais sans être reconnu comme tel,

Un Chef d’Orchestre à Cordes comme il faut

Devant lesquels il se dressait,

Fier et calme, comme un leader

                   de la musique

Dans la Grande Nuit Historique du Monde,

Il fit gémir son petit saxophone,

L’alto, lamentation claire et

perçante,

Accord parfait et harmonie brillante,

Toot – et les auditeurs réagissaient

Sans le montrer et se mirent à parler

Et bientôt toute la boîte se mit à frémir

Et tout le monde parle et Charlie

                                               Parker

Les siffle jusqu’au bout de l’éternité

Avec son bâton patoole à la St

                                               Patrick irlandais,

Comme la sainte pisse nous blopons

Et plopons dans les eaux du

                                               massacre

Et de la viande blanche, et mourons

L’un après l’autre, sans perdre

                                               la mesure.

 

Et ce qu’elle est gentille, l’histoire

Quand vous entendez Charlie Parker

                                               la raconter

Sur disque ou à une session,

Su lors d’un engagement dans un club,

Intraveineuse pour le portefeuille,

Gaiement il Sifflait le

                            saxo

                            parfait

 

De toute manière, pas de différence.

 

Charlie Parker, pardonnez-moi –

Pardonnez-moi pour ne pas avoir répondu à vos yeux –

Pour ne pas avoir su indiquer

Ce dont vous êtes capable d’inventer –

Charlie Parker, priez pour moi –

Dans les Nirvanas de votre cerveau

Où vous vous cachez, indulgent et immense,

Plus de Charlie Parker

Mais le nom secret et indicible

Portant un mérite

Immensurable d’ici.

Vers le haut, le bas, l’est ou l’ouest –

-         Charlie Parker, levez le fléau,

de moi et de tout le monde